samedi 21 avril 2018

Argento Magus

L'évolution d'Argentomagus au travers des siècles est véritablement fascinante, notamment par l'impression de continuité et de cohérence des évènements en un même lieu :

Du théâtre antique sur le coteau, on surplombe le gué celte qui traverse encore la Creuse, en face du Castrum carolingien, non loin des ruines du pont romain, au bout de la ville du Moyen-age, à l'extrémité d'une petite rue tellement classique que Georges Sand aurait pu en décrire les genêts par dessus les murs.

Ce ne sont pas des genêts, mais je ne connais pas cette plante à fleurs rose.
Et cette petite rue s'appelle d'ailleurs toujours "la Rue du Gué". Depuis 3000 ans probablement.

La permanence dans le lieu, depuis la nuit des temps, tend à réfuter la conquête effectuée par Rome en -52 comme l'évènement fondateur d'une civilisation, telle qu'on la présente habituellement. Les artefacts antérieurs à Rome réfutent clairement l'idée selon laquelle, avant Rome il n'y avait rien. Argentomagus fait au contraire de Rome un simple avatar du continuum d'une réalité historique plus ancienne : Rome est venue, puis Rome est repartie.

Le Magus de l'Argento (Le "marché de l'argent" en langue celte) a toujours été installé à la croisée d'un système complexe de voies bituriges, pour servir les échanges de marchandises et de voyageurs. Ces voies bituriges originelles ne seront complétées que bien plus tard par le système des nouvelles voies romaines.


C'est l'abondance en eau, tirée d'une fontaine gauloise du 1er siècle, desservie par un conduite de troncs de bois évidés et enterrés sur 6000 mètres, qui a permis le développement d'un bourg (200 maisons), sur ce plateau karstique très sec. Curieusement d'ailleurs, le Lugdunum présente une exposition temporaire ces jours-ci, sur l'Aqua qui serait "l'invention des romains". Certes ceux-ci ont amené en Gaule la technique des "aqueduc" dans des architectures maçonnées splendides et toujours spectaculaires, permettant de conduire très loin de l'eau sur des déclivités très faibles, mais de là à parler d'invention de l'"aqua" ...

C'est une muraille gauloise qui ferme le plateau au Nord au 1er siècle, et qui protège la petite ville celte devenue romaine par conquête. Dans cette ville, un noble gaulois (le mot "noble" est ici un anachronisme, la noblesse au sens moderne n'existera que dans plusieurs siècles) a changé son nom au IIIème siècle par snobisme pour prendre un nom à la romaine en 3 parties :  Quintus Sergius Macrinus, sans doute en hommage à l'empereur Macrinus (217).
On sait depuis longtemps que le patrimoine des noms se renouvelle très vite à chaque invasion, essentiellement par le snobisme des élites sociales. Du coup, de nos noms celtes d'origine, il ne reste pratiquement rien, sauf un Vercingetorix parfois, au détour des pages de la Guerre des Gaules.
Un double effacement onomastique va se produire en Gaule : effacement par des noms romains au 1er siècle, puis effacement à nouveau par des noms à consonance franque au 5ème siècle. C'est ainsi que nos rois, dans le futur,  s'appelleront souvent Hlodowig, "francisé" en Clovis puis en Louis.


C'est pourquoi je suis de plus en plus gêné par cette convention unanime et facile du Latin qui nous aurait donné le Français, sous le prétexte globalisant que Rome nous a apporté les aqueducs.

L'argent se disait "Argento" en langue celte des siècles avant que Cesar vienne nous imposer l'"Argentum". Même si on n'écrivait pas la langue celte, pour des raisons d'interdit religieux.


Ne pourrait-on pas revenir à cette théorie que j'ai beaucoup aimée, rédigée par un Chartiste en 1828, S.-F. Fallot de Montbéliard, qui inverse complètement le sens des héritages, et qui dit que notre langue celte serait mère du Latin ?

Parce que Brennos (un Senon) a été s'installer à Rome en -313.
Et qu'il y est resté lui.
Pas comme Julius qui n'a fait que passer en massacrant.

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